« Tu es très empathique, tu feras une bonne médiateure ! » Combien de fois ai-je entendu cela ?
Ceci dit… Cela mérite réflexion. Le médiateur doit-il user de ses capacités d’empathie, s’il en a, pour conduire de « bonnes » médiations ?
Tenez, voyez Noémie, qui demande le divorce : après 20 ans de mariage, Arthur la quitte pour sa secrétaire, bien plus jeune qu’elle ! Et en plus, il ne veut pas lui allouer une pension alimentaire convenable ?
Lors de l’entretien individuel, Noémie est à fleur de peau, sans cesse au bord des larmes. Qui n’aurait pas envie de compatir, de confirmer que ce type est un salaud, que la crise de la cinquantaine a bon dos ? C’est peut-être ce que vous feriez, dans le cadre de votre relation amicale avec elle. Le médiateur professionnel, lui, sait que les choses ne sont pas si simples, que le conflit est entretenu d’une façon ou d’une autre par les deux personnes concernées. Mais il ne cherche pas ni victime ni coupable non. Son objectif, c’est la prise de conscience par chaque personne de ce qu’elle a pu faire ou dire qui y a contribué.
Il va donc faire réfléchir Noémie.
– « au début de cet entretien, vous avez indiqué que de toutes façons vous et votre mari, vous ne vous voyiez plus beaucoup, avant qu’il parte.
– Oui, c’est vrai depuis que les enfants sont assez grands, j’ai pris des responsabilités dans une association et je suis souvent prise. Il me le reprochait souvent, et vertement d’ailleurs !
– Ce que vous dites, c’est que la relation entre vous avait évolué, et que le dialogue devenait difficile.
– En effet. Il m’avait demandé d’être plus à la maison, et j’avais refusé.
– En fait, à ce moment-là, votre travail et votre activité associative étaient vos priorités »
A ce moment de l’entretien, Noémie commence à comprendre qu’elle a une part de responsabilité dans la décision de son mari de se tourner vers une autre femme.
S’il avait fait preuve d’empathie, le médiateur aurait « loupé » cela. Le dialogue rapporté ici peut ouvrir la voie à une autre issue que le divorce, en imaginant un nouvel équilibre relationnel entre Noémie et Arthur. Ou pas, tout va dépendre de l’ensemble des perceptions que chaque personne a eu des actions ou décisions de l’autre. Néanmoins il ouvre à une réflexion plus rationnelle sur leur relation et sur ce qu’elle va devenir.
Le choix de devenir médiateure est guidé par l’envie, le souhait d’aider les personnes à sortir des souffrances liées au conflit. C’est donc incontestablement un choix empathique. Mais comme tous les médiateurs formés à l’École Professionnelle de la Médiation et de la Négociation, je laisse mon empathie au vestiaire quand j’exerce. Ainsi, je peux réellement accompagner les personnes vers la résolution de leur conflit, en leur permettant d’ouvrir les yeux sur les besoins et attentes de chacun. Je peux également rester impartiale, c’est-à-dire traiter les deux personnes en médiation de la même façon, et neutre par rapport à la solution qu’elles retiendront.
L’exemple choisi ici (un peu cliché, j’en conviens) se situe dans la sphère privée. Il en est exactement de même dans la sphère professionnelle, puisque la mécanique de construction du conflit est la même !
Si vous faites face à une difficulté relationnelle, contactez-moi, et parlons-en !